Jeremy Dumoulin travaille comme chargé de projet recrutement et emploi pour le département de l’Isère. Il a intégré le projet emploi d’abord pour aider les entreprises locales dans leur recrutement.
Le parcours de Jeremy Dumoulin
Jeremy a commencé à travailler à l’âge de 16 ans et a touché à de nombreux domaines d’activité. En 2009, il rencontre Françoise Baroudi chez Manpower et fait une alternance pour valider un master en école de commerce. Actif à cette époque dans le monde culturel et événementiel, il découvre le monde du recrutement. « J’ai retrouvé ce même dynamisme, on fait toujours la même chose sans faire la même chose. Je suis devenu accro et je n’ai pas lâché cet univers ».
En 10 ans, Jeremy Dumoulin a eu de nombreuses expériences dans le recrutement et cela dans différents domaines. En Suisse, dans l’informatique puis en tant que consultant avant de revenir dans le secteur de Lyon où il crée sa boîte d’appui en consulting. Jérémy Dumoulin travaillera également au sein de l’école du recrutement et en 2019 il souhaite prioriser l’impact social de son travail en devenant Mentor, activité qu’il tiendra en parallèle de père au foyer de 3 enfants en bas âges sur 2020 pour permettre à sa compagne de valider une évolution professionnelle. Puis, embauché par le Département de l’Isère, il travaille depuis janvier 2021 sur le projet Emploi d’abord ce qui lui a permis de revenir à ses racines géographiques et sociales.
« Emploi d’abord » a pour but de réhabituer les différentes parties à communiquer.»
Emploi d’abord a été lancé en 2019 en nord Isère puis une deuxième équipe a été créée en 2020 sur le secteur grenoblois.
« Tout le monde doit préjuger sur un bout de papier. Un candidat à travers une annonce et une entreprise à travers un CV. Que l’on soit un candidat ou une entreprise, on n’a pas forcément les bonnes ressources pour avoir les outils marketing qui permettent à l’autre partie d’avoir les informations nécessaires pour préjuger de manière qualitative.
Avec Emploi d’abord, on amène une intermédiation. En effet, on a du mal maintenant à juste traverser la route pour trouver un emploi ! Les portes ne s’ouvrent plus et on vous dit “Et bien ouvrez votre ordinateur c’est quand même plus simple !” Avec ce concept, les élus du département ont voulu mettre en place une méthode, un projet pour recréer la communication entre les personnes. »
Jeremy Dumoulin, un décomplexé du recrutement ?
« Bon c’est vrai, je n’ai pas mis à jour mon statut sur Linkedin depuis longtemps. Mais dans les années 2010, pour un recruteur ou un consultant, il fallait le costume, être pragmatique, toujours très sérieux et être la personne qui avait un avis sur tout et qui donnait des conseils aux gens ! Moi, ce n’est pas du tout mon approche, je suis un décomplexé dans le sens où j’ai conscience qu’être recruteur c’est exercer plein de métiers à la fois, on peut être sérieux sans se prendre au sérieux ! »
Une évolution dans le métier de recruteur ?
« Oui, il y a une évolution même si tout le monde n’y est pas encore car il faut que ça rentre dans les mœurs mais aujourd’hui clairement l’Ecole du recrutement y contribue, il y a une approche de retrouver l’échange et de se dire qu’on ne va pas décider à la place de l’autre. Bon dans le privé on a un souci du résultat et dans certaines entreprises très hiérarchisées il faut suivre un process très structuré. Mais il y a plus de légèreté, on peut rigoler avec les candidats, on n’est plus obligé d’être le sachant et c’est ce qui fait une force aujourd’hui au niveau social ! »
Les tendances du recrutement : vers un recrutement projectif
« Aujourd’hui avec la situation du marché actuel, il y a beaucoup de choses qui se jouent ! L’idée est de laisser tomber le recrutement sélectif pour être sur un recrutement projectif ! On va gérer les risques ! Pour un recrutement efficace on doit diminuer les taux de risque au minimum. La stratégie la plus commune est d’être dans le sélectif c’est-à-dire mettre un certain nombre de critères de sélection auxquels les candidats ou entreprises doivent répondre pour pouvoir postuler ou être contacter.
Intrinsèquement on se focalise sur les faiblesses de l’autre partie, pour décider de ne pas y aller. A contrario, l’approche projective c’est d’essayer d’aller voir les forces de chaque partie pour s’appuyer dessus et se projeter sur une collaboration. Pour les lacunes, par exemple celles d’un candidat, il faut se demander si les forces de l’entreprise peuvent permettre de combler ces lacunes et inversement. »
« Le recrutement projectif redonne tout son sens à la période d’essai ! »
« Cette période d’essai va donner lieu à un plan d’intégration. L’intégration n’est pas que sociale, elle est aussi au niveau du métier, des spécificités d’une entreprise versus une autre. Il faut construire un plan d’intégration qui prenne en compte toutes les forces des deux parties définies pendant la rencontre. Il faut se donner des objectifs avec des moyens qu’on met en place l’un et l’autre et on fait des points réguliers. Il faut prendre cette habitude d’échanger de manière régulière et d’adapter les moyens mis en place pour valider ou non une période d’essai, mais au moins on aura vraiment essayé ! »
Jeremy Dumoulin suit de près cette période d’essai lors de rendez-vous tripartites hebdomadaires où valide ainsi les objectifs et moyens mis en place. « On regarde aussi l’environnement social et l’impact que cela a sur la vie personnelle car il faut que les choses soient dites dès le départ. On apporte les méthodes mais on demande du temps, car on est dans l’humain ! »
Quels sont les domaines d’activités qui ont dû mal à recruter ?
« Aujourd’hui, tout le monde est concerné ! Tous les corps de métier et secteurs d’activités… Après, les secteurs en complexité sont les services d’aide à domicile, services de santé, l’industrie mais c’est à cause d’un problème de valorisation des métiers ! La grande distribution également car ce n’est pas valorisant ni valorisé mais généralement c’est lié à la méconnaissance et aux préjugés. Attention aux amalgames, car par exemple être préparateur de commandes ce n’est pas la même chose dans une grosse structure comme Amazon où tout est réglé à la minute que préparateur de commande dans une petite société ! Et pourtant c’est le même titre mais pas les mêmes compétences demandées. Aujourd’hui c’est impossible de décrire tout cela dans une annonce ! Elle ferait 14 pages ! »
Pas de CV mais une rencontre…
« Ici pas de matching, on met les personnes en face de leurs responsabilités. Les gens pensent à tort des êtres humains. Mais quand une personne à la capacité de se projeter sur un poste avec toutes les contraintes du métier elle est capable de se dire d’elle-même si elle peut le faire ou pas à partir du moment où elle est dans un libre choix et qu’elle est dans une relation de confiance. Cela permet que la personne analyse sa propre expérience et la projette sur le poste afin de définir les forces pour une opportunité ainsi que les lacunes ou risques. Du coup, lors d’une rencontre, nous avons tout de suite les avantages et les inconvénients ! En face, il y a source de discussion et de projection. »
Des conseils pour ceux qui sont à la recherche d’un emploi ?
« Éviter de préjuger, être socratique, imaginer que l’on ne se sait pas et se positionner dans la curiosité, c’est une des clés ! Aujourd’hui l’offre et la demande sont équilibrées. On est dans une situation où les offreurs et demandeurs ont besoin l’un de l’autre. Il n’y a pas de rapport de force et il y a plus de possibilité d’être dans la curiosité et dans l’échange. Il faut prendre le temps de définir ses enjeux, qu’est ce qui est important, qu’est ce qui compte le plus pour moi. Bien sûr il y aura plusieurs enjeux et on ne pourra pas tous les combler. A partir de là il faut oser ! Oser contacter, oser se déplacer, oser appeler… Ça demande du temps, du courage, c’est épuisant mais il ne faut pas lâcher l’affaire ! »
Le mot de la fin de Jeremy Dumoulin « J’espère que l’offre et la demande vont réussir à se retrouver ! »