Travailleuse indépendante et flexible dans ses horaires, Anne ne rencontre pas spécialement de difficultés pour atteindre le sacro-saint équilibre entre vies professionnelle et familiale. Ce qui ne l’empêche pas de trouver qu’appeler « congé » le « congé maternité » est un non-sens. Ni d’affirmer qu’il y a « du boulot » en France sur le volet qui nous intéresse : la parentalité et l’emploi.
Dans le cadre de notre théma qui donne la parole à des parents et à des entreprises sur ce sujet, nous avons rencontré Anne, maman de Giulia, 5 ans.
Pendant 8 mois, nous avons collecté des témoignages de parents, de recruteurs et de professionnels. Ils nous parlent souvent en anonyme de leurs difficultés ou des initiatives positives qu’ils ont mises en place. Ce dossier n’a pas pour vocation de récompenser les bons élèves et de fustiger les mauvais, mais uniquement de donner la parole sur un sujet qui concerne de nombreux Français.
Pendant 8 mois, nous avons collecté des témoignages de parents, de recruteurs et de professionnels. Ils nous parlent souvent en anonyme de leurs difficultés ou des initiatives positives qu’ils ont mises en place. Ce dossier n’a pas pour vocation de récompenser les bons élèves et de fustiger les mauvais, mais uniquement de donner la parole sur un sujet qui concerne de nombreux Français.
« Comment les entreprises facilitent-elles le quotidien des parents salariés ? Je pense que ce n’est pas ça le débat. C’est plutôt : Pourquoi les entreprises ne facilitent-elles pas le quotidien des parents salariés ? Et même des mamans salariées, car il faut arrêter de prendre les gens pour des cons, la parentalité et l’emploi c’est surtout un sujet de mères. Et même des mères salariées tout court ! »
On peut dire qu’Anne n’a pas sa langue dans sa poche. Notre interlocutrice du jour a un point de vue très tranché sur la question. Pourtant elle n’a pas été confrontée à ces problématiques. Quand elle a su qu’elle voulait des enfants, elle a préparé leur arrivée sur le volet professionnel.
« Quand j’ai eu 30 ans, l’horloge biologique s’est réveillée. Je voulais des enfants, et je savais que je ne voulais pas avoir d’enfants dans un schéma de boulot classique. Il faut dire que j’étais célibataire à l’époque et que j’envisageais de faire un bébé toute seule. »
Anne a quitté son emploi 3 ans avant la naissance de sa fille et s’est lancée dans l’aventure de l’entreprenariat.
« J’ai monté ma boite pour choisir mes horaires. J’ai attendu d’atteindre l’équilibre financier avant d’envisager d’avoir un bébé. Bon au final, je ne l’ai pas fait toute seule et il y a plein de choses que je n’avais pas envisagées. Comme le fait qu’arrêter de développer son entreprise pendant plusieurs mois rend difficile la reprise. Contrairement à un patron qui a l’obligation de le faire, les clients ne vous attendent pas forcément. »
Pour Anne l’entreprenariat est davantage compatible avec une vie de famille. « Quand on a des horaires flexibles, on peut plus facilement s’adapter à sa vie de famille. Enfant malade ? Pas de problème je bosse de la maison ! Emmener Giulia à la gym ? Aucun souci j’ai adapté mon agenda professionnel à cet impératif. » Contrairement au salariat, avoir sa propre entreprise permet à la maman de caler son planning professionnel sur son planning personnel. « J’ai toujours accordé énormément d’importance à la vie perso. Pour moi on travaille pour avoir une belle vie personnelle, l’inverse ne peut pas marcher. Je suis convaincue que ça aurait été impossible si j’étais restée salariée. »
Anne reproche à l’entreprise de ne pas considérer les situations personnelles des employés, au-delà même de la parentalité.
« On devrait pouvoir rendre le travail flexible même si on n’est pas parents. Un truc con, mais par exemple pour aller chez le gynécologue. Il faut 6 mois pour avoir un rendez-vous, s’il y en a un qui se libère autant dire qu’on se jette dessus ! Sauf qu’avant de saisir l’occasion, on doit vérifier avec son N+1 que c’est envisageable, lui-même le proposera à son N+1, et pour 1h d’absence du bureau on prendra un demi RTT. Autant dire que le temps que le décisionnaire soit averti qu’on a besoin de se faire contrôler la foufoune, le rendez-vous a déjà été pris par une autre femme désespérée. »
« Le monde du travail n’est pas adapté d’ailleurs tout court aux modes de vie actuels. On dirait que la majorité des entreprises en France sont restées figées dans une époque où les hommes travaillaient pour subvenir aux besoins du foyer, pendant que les femmes pouponnaient à la maison. Un moment où avoir fait carrière était plus valorisant qu’avoir voyagé, construit un foyer ou développé une passion. En 2022 on s’épanouit autant si ce n’est plus dans sa vie personnelle. »
Anne l’admet elle est « pleine de préjugés » sur le salariat. C’est un monde pour elle rempli de « contraintes ». « Je vois le salariat comme un monde figé :
– On commence toujours à la même heure pour finir à la même heure aussi et souvent ce ne sont pas les mêmes heures que celles de l’école !
– On peut télétravailler pour certaines entreprises, mais la majorité n’ayant pas confiance en leurs salariés, préfèrent que les employés restent au bureau. Et en plus il faut prévenir bien en avance, même s’il n’y a pas de réunions !
– Une semaine de congés en plus ? Impossible c’est hors cadre, même s’il n’y a pas de travail, ou qu’on rattrape nos heures. «
"Honnêtement je ne sais pas comment font les parents pour gérer leurs vies de famille avec ce manque de souplesse. Ca répond à la question initiale non ? Parentalité et emploi, quand on est salarié, c’est la merde. "